Dans les salles d’audience de Moscou, un événement retient l’attention du public et des médias : le procès très médiatisé du reporter américain Evan Gershkovich. Accusé de crimes qu’il nie catégoriquement, ce procès soulève des questions sur la liberté de la presse en Russie et suscite l’intérêt du monde entier. Retour sur les premiers instants de cette affaire qui s’annonce comme un véritable enjeu diplomatique.
Le contexte de l’affaire
Depuis mars 2023, Evan Gershkovich, un journaliste de 32 ans travaillant pour le Wall Street Journal, est derrière les barreaux en Russie. Arrêté à Ekaterinbourg, là où il enquêtait sur la région de l’Oural, ce reporter intrépide fait face à de graves accusations d’espionnage. La capitale russe, Moscou, et plus spécifiquement la prison de Lefortovo, est désormais son lieu de détention, connu pour les affaires politiques et sensibles.
Enjeux du procès
Le procès d’Evan Gershkovich s’ouvre ce mercredi et devrait se dérouler à huis clos, une mesure courante dans ce type d’affaires. Ce journaliste américain pourrait écoper d’une peine de 20 ans de prison. Cette accusation, officiellement portée au début du mois de juin, est une première pour un journaliste occidental depuis l’époque de l’Union soviétique.
Réaction de la communauté internationale
Les accusations d’espionnage portées contre Evan Gershkovich ont été vivement rejetées par son employeur, le Wall Street Journal, le gouvernement américain et le journaliste lui-même. Malgré les assertions du parquet russe affirmant que Gershkovich a été pris en flagrant délit d’espionnage pour le compte de la CIA, aucune preuve concrète n’a été présentée.
Conditions de travail des journalistes en Russie
Avant même son arrestation, les conditions de travail pour les journalistes étrangers en Russie se sont grandement détériorées. Evan Gershkovich faisait partie des derniers reporters anglophones encore actifs dans le pays, suite à la loi de mars 2022 criminalisant les fake news sur l’armée russe. Cette législation a forcé de nombreux journalistes russes à quitter le pays.
L’hypothèse de la monnaie d’échange
La détention de Gershkovich a rapidement pris une tournure géopolitique, certains commentateurs américains affirmant qu’il est devenu un « otage » dans un jeu d’échecs mondial. Son arrestation fait écho à celle de Britney Griner en 2022, dont la libération a été négociée en échange du trafiquant d’armes Viktor Bout. Le président russe Vladimir Poutine a lui-même laissé entendre qu’il pourrait envisager un échange pour récupérer Vadim Krasikov, un tueur à gages en détention en Allemagne.
Une tendance inquiétante
Les affaires ne s’arrêtent pas au cas d’Evan Gershkovich. En automne 2023, Alsu Kurmasheva, une journaliste russo-américaine travaillant pour Radio Liberty, a été arrêtée et accusée d’avoir propagé des « faux » sur l’armée russe. Elle risque, elle aussi, plusieurs années de détention.
Plus récemment, Ksenia Karelina, une autre russo-américaine, a été arrêtée pour avoir soi-disant envoyé 50 dollars à une association en faveur de l’Ukraine. Elle est aujourd’hui accusée de haute trahison. Le juge en charge de son dossier est le même que celui du procès d’Evan Gershkovich, dont l’issue ne fait malheureusement guère de doute compte tenu du taux de condamnation de 99,5 % en Russie.
Ces affaires révèlent une tendance inquiétante pour les citoyens américains en Russie, face à une législation de plus en plus répressive et un climat de nouvelle guerre froide entre Moscou et Washington.